Ce livre est un poison.
Je l’arrache de mes doigts calcinés pour écrire. Puisque seule l’écriture me permet de transcender le mal qu’il me fait.
L’amie de cet ouvrage fleuve, Lila, est une perverse narcissique dans toute sa puissance et sa nocivité. Elle a trouvé dans la narratrice la victime parfaite soumise et ravagée. Elle ne la maintient en état de survie que pour pouvoir continuer à l’utiliser, à la broyer, à piétiner ce qui reste de vivant en elle.
Tous ses actes, toutes ses intentions n’ont pour seul objectif que la destruction des autres. Celle d’Elena en particulier, celle de toutes ses fréquentations en général.
Lina ne se montre douce et câline, enthousiaste et souriante, délicieuse, intelligente que pour mieux les attacher puis les percute violemment de ce pouvoir destructeur incontrôlable.
Je ne supporte pas cette lecture mais ne peut m’en libérer.
Je suis la narratrice Elena, cette fille si peu sûre d’elle, doutant sans cesse de sa légitimité, persuadée de n’exister qu’à travers Lina, qu’à travers son amour, qu’à travers sa méchanceté. Et surtout lui trouvant des excuses valables ou logiques pour justifier l’inadmissible. Expliquant tous les gestes de la perversion par la fragilité de Lila – et ce double prénom, comme pour mieux dire l’insaisissable.
Elena se sent unique d’être choisie, valorisée par des compliments épars, poussée par une admiration feinte. Elle se sent indispensable comme écran entre Lina et les autres, comme medium de ses réactions incompréhensibles, imaginant être seule à avoir une quelconque emprise sur sa méchanceté. Alors que c’est elle qui est manipulée.
Elena ne voit pas que la seule motivation de Lila à la séduction de Nino est bien évidemment, de la détruire, elle, Elena, et de détruire Nino et son destin brillant. Juste pour le plaisir de la dévastation.
Elena supporte que toutes les situations lui soient reprochées, les circonstances retournées comme un pauvre tee-shirt afin que Lila se dédouane de toute responsabilité, faisant endosser à sa soi-disant ami l’entière culpabilité de tous les échecs.
Je ne nie pas que les pervers narcissiques soient malades et qu’ils doivent souffrir atrocement mais pour en avoir été la victime, je sais aussi que la seule façon de leur échapper est de fuir. Il n’y aucun combat qu’ils ne soient capables de gagner.
J’ai envie de crier : « Elena, cours ! fuis ! libère-toi ! »
Ce livre est l’incarnation du mal. Il me fait souffrir comme j’ai déjà souffert de cette destruction totale.
Il est fabuleux et je ne veux plus que lire, au détriment de tout le reste de mon existence. Pourtant, je voudrais le jeter au loin et l’oublier, comme il faut le faire avec ces déments.
Oserai-je une opinion toute contraire ? J’ose
Ce roman raconte la vie d’une psychopathe : Elena Greco
Souffrant de trouble dissociatif de la personnalité, elle a inventé Lila.
Lila n’a pas d’existence propre : c’est une sorte de meilleure amie inventée comme on peut en avoir dans la petite enfance, mais lorsque ça dure au-delà des premières années d’école primaire, mieux vaut emmener l’enfant chez le psy.
Mais Elena perçoit Lila comme un être vivant : son « amie », qu’elle jalouse dès l’école primaire, qu’elle a pour ambition de toujours dépasser, qu’elle décrit comme méchante – c’est même le qualificatif qu’elle utilisa le plus souvent – dont elle a peur… Elena, douée, carriériste mais peu sûre d’elle, qui se vit comme imposteur, utilise son double Lila, pour se victimiser chaque fois que quelque chose dérape dans sa vie.
Lila n’est ni perverse ni manipulatrice, Lila n’est qu’une création du cerveau malade d’Elena.
C’est ainsi que j’interprète une phrase de la dernière page du tome 4 » Toute la vie, elle n’avait fait que raconter son histoire de rédemption, en utilisant mon corps vivant et mon existence ». A ce moment de la conclusion, on perçoit la double personne qu’est la narratrice. Devant cet aveu effrayant, le paragraphe suivant reprend « mais peut-être que non »…
Cela dit, l’ensemble du récit est passionnant, y compris les nombreux rappels historiques et l’immersion dans le monde étudiant des années 70.
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J’adore ton point de vue !! Quand je t’ai lue, je n’avais pas encore terminé la saga. Ton avis a tout de suite fait mouche et j’ai lu les derniers chapitres avec une curiosité aiguisée… J’aurais presque envie de relire les 4 tomes avec cet éclairage 🙂 Merci beaucoup de ton commentaire !
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Hello je me pose une question : Si Lilia est une pervers narcissique, est-ce que ça fait d’elle un personnage moderne? Merci 🙂
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Pour moi non. D’ailleurs la méchanceté a vécu… Nous entrons dans l’ère de la bienveillance !! Enfin je le souhaite 😉
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Je pense que l’auteur a réussi l’effet qu’elle recherchait à travers son ouvrage, au vue de cette critique … je ne l’ai pas (encore) lu, mais un livre comme celui-ci m’avait fait ressentir un peu ce genre de choses … Antéchrista, d’Amélie Nothomb !
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Je ne connais pas le livre que tu cites mais de base, A. Nothomb me met mal à l’aise… je ne suis pas sûre d’avoir le courage de plonger dedans
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Bon je suis à moitié pardonnée donc 😉 J’ai adoré les 3, comme tu dis c’est tellement bien décrit que ça fait froid dans le dos. Perso ça m’a fait penser à certains épisodes douloureux au boulot… Quand tu le lis tu te demandes pourquoi elle continue à entretenir cette relation mais quand tu le vis tu ne vois pas du tout l’engrenage dans lequel tu es. Vaste sujet 😉 ! Tu as des recommendations pour moi pour faire ma réserve pour l’été ? Bises
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pas trop de conseils… j’ai une liste immense de trucs à lire mais j’avance pas trop dans mes lectures 😦 sinon tu peux te connecter à mon profil sur Babelio et tu verras ce que j’ai lu / je lis et projette de lire !
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C’est amusant. je lis ton post alors que je suis moi aussi plongée dans le nouveau nom… et moi aussi (malgré ma fatigue), je lis, je lis, je lis, soir après soir. Comme toi ce livre me brûle les doigts… je suis exaspérée, angoissée, terrifiée par la personnalité de Lila même si je n’avais pas mis le nom de pervers narcissique sur elle.
Et là, je suis arrivée au moment où Elena va partir étudier à Pise ! J’en suis tellement heureuse pour elle. Hier soir, j’ai hurlé (de joie) : C’EST ÇA SAUVE-TOI !
PS l’été dernier j’ai lu le nouveau nom mais je n’ai pas pu me plonger dans le deuxième immédiatement, j’ai attendu un an pour enchainer !
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Je crois que ce qui est décrit est tellement criant de vérité que les plaies de ceux qui en ont souffert se ré-ouvrent d’elle-même… Je suis soulagée que tu partages mon sentiment, c’était violent et je me suis demandée si je n’étais pas en train de devenir folle ^^
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Petite rectif à mon commentaire… en fait l’été dernier j’ai lu Une amie prodigieuse… et en ce moment je lis Le nouveau nom.
Et plus je réfléchis, je pense en fait que ton billet m’a fait toucher du doigt un déni…
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c’est intéressant…
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oulala je m’en veux un peu de t’avoir mis ce poison dans les mains… C’est moi qui t’en avait parlé, non ?
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Oui, c’est toi : « vade retro satanas !! »
sauf qu’il était déjà sur ma liseuse quand tu m’en as parlé… ça l’a juste fait remonté dans ma PAL 😉
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